Publié le 29 Mai 2024
On en parle de plus en plus depuis l’invasion russe en Ukraine, et la réaction de solidarité et de sécurité collective de notre pays face à cette agression : nous devons faire face à une véritable « guerre cognitive ». Une guerre qui vise, au-delà des armées, la « société civile » sans laquelle, dans nos sociétés démocratiques, rien de sérieux et durable ne peut être mené.
C’est un sujet important, en soi. Et on trouvera ici quelques pistes pour les lecteurs intéressés par les affaires stratégiques.
Mais les leçons qu’on peut (et doit ?) en tirer ont aussi leur prolongement dans nos entreprises, dans nos pratiques et responsabilités au quotidien. Car celles-ci peuvent susciter, dans des contextes a priori plus apaisés, une véritable « guerre involontaire ». Et parce qu’aussi, elles appartiennent au continuum de nos « forces vives » et à ce titre, contribuer à la résilience de notre société (et de la leur).
Commençons, pour circonscrire la réflexion du moment, par un point de vocabulaire.
Certains auteurs spécialisés utilisent, pour traduire en français[1] la « cognitive warfare », le terme de « guerre cognitique ».
Cette traduction a le grand mérite d’exprimer, dans ses sonorités, le double volet technologique et humain de ces actions : « La ‘guerre cognitique’, ou cognitive warfare, est donc une guerre non conventionnelle qui s’appuie notamment sur les outils cyber et dont le but est d’altérer les processus cognitifs d’ennemis, d’exploiter des biais ou des automatismes mentaux, de provoquer des distorsions des représentations, des altérations de décision ou des inhibitions de l’action, et entraîner des conséquences funestes, tant du point de vue des individus que du collectif »[2].
Mais puisque je considérerai essentiellement, dans cette contribution, les aspects organisationnels et humains, j’utiliserai celui de « guerre cognitive » : « Relevant d’une approche pluridisciplinaire combinant sciences sociales et nouvelles technologies, la guerre cognitive vise à altérer directement les mécanismes de compréhension du monde réel et de prise de décision pour déstabiliser ou paralyser un adversaire : en d’autres termes, elle vise à agir sur le cerveau de l’adversaire puisque c’est là que s’y gagnent les guerres, y compris « avant la guerre », en écho à la vision stratégique du chef d’état-major des armées françaises »[3].
Un domaine d’opérations centré sur l’humain
Dans le champ stratégique, cette guerre cognitive est menée par des puissances hostiles, étatiques ou non. On parle aujourd’hui de la Russie de Vladimir Poutine mais ce n’est pas le seul État à mener des actions offensives vers nos sociétés ouvertes (les actions de l’État chinois sont désormais explicitement décrites dans les études se référant à ce domaine, et il en existe d’autres[4]).
Alors bien sûr, la « guerre psychologique » n’est pas une nouveauté. Mais elle est amplifiée aujourd’hui par la place prise par « l’information » dans nos sociétés modernes, qui facilite pour les agresseurs l’accès jusqu’au « destinataire final ».
Et parce que la démultiplication des actions hostiles est plus aisée avec les moyens techniques contemporains – sans que ceux-ci ne doivent faire oublier les traditionnels moyens « humains ».
Le schéma suivant, reproduit dans plusieurs articles cités et notamment celui de D. Pappalardo (cité en référence), explicite clairement la complémentarité de ces actions :
La « guerre cognitive » a donc des effets dans le domaine technique, mais aussi dans les domaines très humains : « La guerre cognitive donne aux adversaires la capacité de façonner la cognition humaine, la perception, la création de sens, la connaissance de la situation et la prise de décision à tous les niveaux. (…) (elle) vise également à perturber les relations, cible les vulnérabilités humaines, telles que la confiance et le biais cognitif, tant au niveau individuel que national. »[5]
Perception, création de sens, prise de décision, relations humaines, confiance… ce sont ici des termes bien familiers au monde managérial.
Et c’est la raison pour laquelle les pistes explorées par le monde guerrier peuvent utilement inspirer celui des entreprises – et réciproquement.
Notons enfin que les nouveaux développements technologiques conduisent d’ailleurs les spécialistes à considérer que cette « CogWar » est plus qu’une extension de la « guerre psychologique » (les « PsyOps ») puisqu’elle associe à ces « PsyOps », des « InfoOps », des « CyberOps », en y ajoutant les outils d’intelligence artificielle et de « machine learning »[6].
Des domaines, là encore, dans lesquels les entreprises s’engouffrent.
La « maison » sécuritaire
Pour faire face à ces menaces multiformes et parce que, contrairement à des affirmations hasardeuses, l’Alliance Atlantique était loin d’être en « mort cérébrale », un groupe de travail de l’OTAN a proposé un modèle (« The House Model »[7]) reposant notamment sur trois piliers :
- Celui des neurosciences, avec des interventions au niveau individuel et collectif ;
- Celui des sciences cognitives et comportementales, avec des interventions de type psychologique ;
- Celui des sciences sociales (société et culture), avec des interventions relatives à la confiance et aux relations.
Ces trois piliers ont naturellement leurs applications dans l’entreprise.
Celui des neurosciences en est encore à ses balbutiements, et ceci malgré l’appétence que des affirmations scientifiques (ou pseudo-scientifiques) peuvent susciter tant chez des décideurs désireux de « décoder » le plus « scientifiquement » possible les comportements de leurs collaborateurs, que chez des prestataires de services plus ou moins sérieux. Car il s’agit, en l’occurrence, des connaissances physiologiques et biologiques relatives à la création de sens (« sense-making »), à la prise de décision et au fonctionnement du cerveau.
Les moyens techniques permettent d’observer, de plus en plus finement, les zones activées dans le cerveau par différents stimuli et la production de certaines hormones et autres molécules. Mais de l’observation à la compréhension, il convient de demeurer prudent. Car concomitance et causalité ne sont pas équivalentes.
Celui des sciences cognitives et comportementales est beaucoup plus exploré et connu puisqu’il relève des connaissances psychologiques relatives à la création de sens, là encore, aux interactions sociales, au comportement humain, aux émotions, à la persuasion, à la communication. Là encore, on observe – depuis plus longtemps que pour les neurosciences - ; et certains proposent des grilles d’analyse, prudentes ou plus affirmatives. On évoquera, par exemple, le fameux « nudge » popularisé par une agence gouvernementale à l’occasion de la crise Covid-19, mais dont les principes suscitent d’autres réalisations, dans nos vies quotidiennes.
Quant à celui des sciences sociales, des approches interdisciplinaires permettent de mieux comprendre les facteurs structurels et institutionnels dans le contexte social, culturel, économique et politique qui forgent, contraignent et/ou accroissent les comportements individuels et collectifs et peuvent conduire à des changements à grande échelle[8]. Là encore, on trouve largement, dans la littérature et dans de multiples cursus de formation, de quoi étancher sa soif d’explications plus ou moins satisfaisantes.
Enfin, en plus de ces trois piliers, le modèle propose des couches transverses, dont la dernière est celle des « situational awareness / sensemaking », déjà évoqués dans les trois piliers.
Ces termes font doublement écho dans le domaine entrepreneurial, puisque venant d’une approche à la fois déployée dans le monde de la sécurité industrielle, mais aussi dans celui des pratiques managériales collaboratives.
Les entreprises, absentes de la guerre cognitive ?
Notre pays semble hésiter, depuis quelques mois, à entrer ou non, partiellement au moins, en « économie de guerre »… Le débat est trop complexe pour l’aborder ici mais, pour le moment en tous cas, il apparaît que cette « économie de guerre » concerne avant tout les entreprises de la « BITD » (base industrielle et technologique de défense) : le monde de l’armement… A ceci près que, avec les technologies dites duales et dans les « guerres hybrides », la frontière est difficile à définir entre monde « militaire » et monde « civil ».
Pourtant, et parce qu’elles sont des employeurs et, dans les faits, des lieux de vie pour leurs salariés, les entreprises doivent être conscientes de leur rôle dans ces guerres cognitives, au moins à titre défensif :
- sur des territoires sur lesquelles nos armées, dans le cadre de nos accords de défense, pourraient intervenir. Et sur lesquels il serait utile d’avoir un accueil au moins bienveillant et pourquoi pas synergique de la part des populations locales, à travers leurs salariés et leurs clients – on pense alors naturellement à toutes nos entreprises implantées sur ces territoires ;
- et, pour le plus grand nombre, sur le territoire national, en assurant les revenus de leurs salariés, en réduisant les facteurs d’incertitude et d’inquiétude, et aussi de fragmentation sociale. Voire en contribuant à développer leur « résilience », y compris dans leur vie quotidienne.
Ce dernier point est crucial, car la confiance, comme on le sait, ne se décrète pas.
Et surtout, parce que la confiance n’est pas (seulement) l’affaire de l’État – qui par contre est en charge des affaires militaires.
« (La guerre cognitive) tente d’instiller le doute, d’introduire des messages contradictoires, de polariser l’opinion, de radicaliser certains groupes et d’inciter ces derniers à adopter des comportements susceptibles d’ébranler ou de diviser une société par ailleurs solidaire.» [9]
Alors bien sûr, l’appel à la cohésion sociale, voire à « l’unité nationale », est souvent utilisé par les décideurs politiques en cas de crise. Mais tel l’appel au loup et pour de multiples raisons, il est probable que celui-ci ait perdu de son efficacité.
C’est pourquoi les entreprises, bien plus que des subordonnés potentiels que l’on pourrait, le cas échéant, réquisitionner pour être en appui des forces armées et de sécurité, pourraient aussi être efficacement considérées comme des partenaires dans la guerre cognitive qui fait déjà rage.
Des partenaires conscients de leurs responsabilités, dans leurs politiques et leurs pratiques. Des partenaires considérés dans le cadre d’une « stratégie des alliés », et donc relevant d’autres modes relationnels que le seul mode directif. Un mode relationnel trop fréquemment utilisé dans la relation entre acteurs publics et privés, alors qu’on doit le réserver aux opposants, et surtout pas aux acteurs potentiellement synergiques, au risque de les perdre.
Guerre cognitive et climat social
« Le champ de bataille est partout »[10] : c’est un des principes non seulement de la guerre cognitive, mais aussi d’autres cultures stratégiques que les nôtres, en Occident.
Nous passons beaucoup de temps dans nos activités professionnelles, et les expériences que nous y vivons influencent nécessairement la vision et les pratiques que nous avons des interactions sociales, au sens large.
Des pratiques bureaucratiques, inopportunément directives ou éthiquement contestables, pourront par exemple conduire au désengagement, à la méfiance. Dans l’entreprise, mais peut-être plus largement, et en particulier si le ressentiment légitimement vécu est remis en perspective dans un narratif plus politique.
A l’inverse, des pratiques managériales et relationnelles respectueuses des engagements pris et la reconnaissance du travail réalisé, par exemple, pourront conduire les acteurs, et aussi en dehors de leur contexte de travail, à (re)trouver des habitudes fondées sur une plus grande confiance mutuelle. La confiance, facteur clé de la guerre cognitive…
Dans ce domaine des relations professionnelles, l’éloignement facilité par le « télétravail », qu’il soit souhaité par les salariés ou par certaines entreprises désireuses d’économies immobilières, ou par des encadrants peu férus de relations humaines, est un facteur de plus de fragilisation des relations sociales :
- en réduisant l’activité professionnelle à sa dimension « productive », alors qu’elle gagne tant à être aussi interactionnelle, que ce soit pour des raisons de créativité ou de lutte contre les silos cognitifs ;
- et en fragilisant psychologiquement et socialement des individus isolés, susceptibles de devenir des « cibles » économiques et/ou cognitives, loin de leurs « managers » - à condition cependant que ceux-ci soient sensibilisés à l’identification des « signaux faibles ».
Et on le voit dans les entreprises, le « management à distance » connaît ses limites, en dépit de multiples formations proposées après le choc de la mise à distance de la crise Covid-19. Parce qu’on tente, en vain, de prolonger des pratiques existantes, plutôt que de s’interroger sur le fond de la relation managériale, et de mettre en œuvre ces mêmes pratiques relationnelles.
Alors, en matière de maîtrise du climat social et, plus largement, de management des parties prenantes, on pourra par exemple recommander l’acquisition des approches et pratiques de la sociodynamique et de la « stratégie des alliés » qui en découle – et ceci d’autant qu’elle s’inspire du jeu de go plutôt que du jeu d’échec : un accent mis donc sur la relation plutôt que sur le résultat gagnant/perdant évoqué dans l’article cité ci-dessus[11].
Et aussi parce qu’on retrouvera dans les approches de la sociodynamique des pratiques organisationnelles qui font écho aux recommandations d’un « best-seller » de la pensée stratégique : les « teams of teams » recommandés par le Général Mc Christal[12], qui associent autonomie et cohérence, goût de l’initiative et sentiment d’appartenance et que la sociodynamique décrit comme des « organisations holomorphes ».
Une raison plus de s’y intéresser, n’est-ce pas ?
Guerre cognitive et désorientation
« A la différence des opérations psychologiques, la guerre cognitive met l’accent sur l’exploitation des vulnérabilités cognitives, et notamment la surcharge attentionnelle, le rétrécissement des perceptions (« le tunnel de la vision »), et les biais cognitifs et les erreurs de jugement qui influencent négativement la prise de décision (Figure 6-1) »[13].
Ces effets délétères de désorientation sont bien connus des entreprises, et en particulier celles qui sont confrontées à des enjeux de sécurité : dans l’énergie, l’aérien, les mines, le transport maritime, la médecine… et qui ont décidé d’adopter les nouvelles approches de la sécurité – les « New Views on Safety »[14].
Car la désorientation, c’est la perte d’attention, la perte de sens… l’incapacité de porter l’attention nécessaire à un événement, ou au contraire, de manquer de vigilance face à une information qui, pourtant falsifiée, paraît crédible…
Et il est intéressant de retrouver dans les travaux de l’OTAN évoqués précédemment deux termes clés d’une de ces deux approches : celle des « High Reliability Organisations » (HRO). A savoir la « situational awareness », ou « conscience de situation »[15], et le « sense-making », la création de sens.
On regrettera cependant, dans ces études, l’absence de référence explicite à un des auteurs clés de ces nouvelles approches : Karl E. Weick[16].
Car la lecture de ses travaux permet d’identifier des réponses à une des difficultés mentionnées dans l’étude, à savoir les difficultés des organisations à obtenir une « conscience de situation » collective : « par exemple, en fournissant sciemment des informations contradictoires à des coéquipiers, ou à différents niveaux hiérarchiques, on peut conduire à la construction de représentations non cohérentes ou à des conflits de perception au sein d’une équipe. L’impact à long terme peut être une dégradation des confiances interpersonnelles, de la confiance en son propre jugement et de la cohésion de l’équipe. (…) Dès lors, l’enjeu de défense porte sur les méthodes et les outils permettant de renforcer la cohésion collective ainsi que sur la fiabilité et la sécurité des systèmes d’information »[17].
Un constat qui s’applique tant au quotidien des entreprises qu’aux enjeux de mobilisation collective, dans le contexte de la guerre cognitive.
Face à la désorientation, la « pleine conscience » ?
Karl Weick est en effet un des penseurs clés de la culture des organisations – une « culture » que l’on fait vivre dans des pratiques partagées, et qui permet le succès des organisations dans des contextes socio-techniques complexes – puisque les « HRO » sont nées de l’observation de systèmes comme des porte-avions, des plateformes pétrolières, de la navigation aérienne, des hôpitaux ou des pompiers confrontés à des feux de forêts de grande ampleur…
Alors Weick (et les HRO) ont contre eux « l’inconvénient » d’être plutôt des psychologues que des ingénieurs. Ce qui, pour des sujets « sérieux », peut être un handicap…
Et plus encore, car Weick dépasse la notion de « situational awareness » (SA) en proposant celle de « mindfulness » - un terme parfois mal perçu.
Là où la SA recommande une attention limitée au périmètre de son domaine – ce qui conduit à une attention en silos, et donc à des difficultés d’interfaces -, la « mindfulness » recommande une attention plus large, y compris aux domaines des autres – ce qui induit une nécessaire coopération.
Et là où la SA prête attention aux détails de la tâche en cours – une attention qui peut être perturbée par des distractions -, la « mindfulness » prête attention à l’émergence de l’imprévu – y compris lorsqu’il émerge des domaines d’un autre… Ainsi le passage régulier de tous les personnels sur le pont d’un porte-avions pour s’assurer qu’aucun objet inopportun ne s’y trouve, sans chercher un « coupable » qui aurait pu l’y laisser…
La « mindfulness » est donc, par nature, collective : « Nous préférons le concept d’expertise à celui d’expert car nous voulons préserver l’argument crucial selon lequel l’expertise est relationnelle »[18]
Mais ce terme suscite immédiatement une prise de recul pour beaucoup de décideurs « sérieux », qu’ils soient militaires ou civils. Car la « mindfulness », c’est la « pleine conscience »… et le terme fait immédiatement le lien avec des démarches que l’on peut qualifier de « développement personnel », peu bienvenues dans les sujets de résilience organisationnelles, et plus encore de défense collective.
Pourtant, la « mindfulness » est bien plus dédiée à la résilience des organisations qu’au seul bien-être personnel : “Les questions clés, pour les individus comme pour les systèmes sont : ‘Suis-je capable de me concentrer pour éviter les distractions, afin d’être attentif et calme’ et ‘Est-ce que je reviens rapidement à mon activité lorsque mon esprit vagabonde’ ? » [19]
C’est sans doute la raison pour laquelle, tout en assumant les liens faits par certains avec des traditions philosophiques et pratiques comme le bouddhisme et la méditation, les spécialistes des « techniques d’optimisation du potentiel humain », bien connus des personnels soumis à hauts niveaux de contraintes comme les pilotes d’avions de combat ou les soldats des forces spéciales, font appel à ce concept, malgré des réserves de principe possibles[20].
Face à la désorientation, la création de sens
Et cet oubli est d’autant plus dommage que Karl Weick est aussi à l’origine de travaux importants sur la « création de sens ».
Un « sense making » crucial pour les sujets de la guerre cognitive : « Pour atteindre ce niveau de compréhension d'événements évoluant de façon non linéaire, (…), il est nécessaire d'avoir une capacité de création de sens. La création de sens est une information et une condition préalable à la prise de décision. Contrairement à la SA, (…) la création de sens exige un effort et une motivation continus pour comprendre les liens entre les personnes, les lieux et les événements (le système des systèmes) afin d'anticiper leurs trajectoires et d'agir efficacement »[21].
Et pour Weick, la « création de sens » est, là encore, éminemment collective et organisationnelle : « Certaines organisations peuvent produire de l’ignorance, une vision en tunnel et de la normalisation, quand d’autres peuvent produire des idées nouvelles, des synthèses originales et des diagnostics inattendus »[22].
Les travaux de Weick, et les pratiques associées, peuvent donc être utiles à la guerre cognitive qui préoccupe les organisations de sécurité comme l’OTAN mais aussi, plus localement, à celles qui s’occupent des secteurs particulièrement sensibles évoqués (nucléaire, incendies, santé…).
Ils peuvent aussi, et on le devine à travers quelques mots-clés familiers au conseil en organisation et en facteurs humains, à des entreprises de secteurs moins critiques, mais pour lesquels l’efficacité collective est essentielle.
Car dans les entreprises, la « perte de sens » ne vient pas seulement de l’extérieur (sauf en cas de tentative d’escroquerie ou d’action malveillante). Elle peut provenir, plus prosaïquement, de l’interne. Et ceci pour des raisons le plus souvent involontaires.
Dysfonctionnements organisationnels, querelles d’egos, injonctions contradictoires… les sources organisationnelles et humaines de la « perte de sens » peuvent être multiples. Mais les effets semblables à une guerre cognitive – menée cette fois involontairement car émergeant des pratiques managériales.
Et c’est pourquoi ces questions de « désorientation » - et les réponses qui peuvent leur être apportées – sont là aussi des champs communs entre les mondes militaire et civil. Et donc de synergies.
Guerre cognitive et automatisation
Enfin, la guerre cognitive comporte un important aspect technique.
« La cognition n’est plus qu’une affaire de cerveau ; elle est, tout au moins depuis cette dernière décennie, en relation avec la technologie numérique et la connaissance partagée. Cette double relation est donc bilatérale et duale. Elle est bilatérale puisque le numérique est une production de la cognition et celle-là nécessite aujourd’hui l’aide numérique. Elle est duale car ces relations concernent à la fois l’individu et les collectivités »[23]
Les « New Views » déjà évoquées s’appuient globalement sur deux grandes approches : l’un plus humain, plus psychologique, l’autre plus technologique, ingénierial.[24]
Et on retrouve dans les travaux de l’OTAN les mêmes convergences avec le monde de ces « New views on safety », et ceci cette fois avec le volet des ingénieurs, du couplage homme-machine et de la « Resilience Engineering »[25].
Une convergence déjà ancienne d’ailleurs puisque, par exemple, un des auteurs séminaux de ces approches, Jens Rasmussen, avait été à l’origine d’un séminaire de l’OTAN, en août 1980[26].
Et ce qui préoccupait déjà les chercheurs et praticiens avec l’automatisation croissante des systèmes, et la nécessaire synergie avec les systèmes cognitifs humains, se trouve évidemment actualisé avec une guerre cognitive qui s’appuie plus que jamais sur les interactions entre hommes et systèmes techniques…
Notons en effet le terme employé : « Human-Machine Teaming ». Car en matière de résilience, il ne s’agit pas du remplacement de l’homme par les machines, mais du couplage homme-machine.
Un point de vigilance qui pourrait sans doute échapper à des organisations soucieuses d’accélérer leur « transformation numérique » en accordant attention, temps et budgets aux seuls volets technologiques (je suis frappé par le nombre de postes ouverts, dans les entreprises et les cabinets-conseil, pour des chefs de projets « Transformation » dont les compétences attendues sont avant tout techniques), et avec l’idée que « l’humain suivra » (au mieux, on le « formera »)…
Car nos entreprises demeurent avant tout des organisations humaines – même si certaines entreprises semblent considérer certains humains comme de nouveaux esclaves pour les systèmes numériques[27].
« Grand remplacement » ou confiance mutuelle ?
Et ceci d’autant que l’actualité est à l’Intelligence Artificielle, avec à la fois l’accélération technologique mais aussi l’effet de mode, à l’instar de celui que nous avions connu il y a dix ans avec la « transformation numérique » (et même « digitale », ça faisait plus « chic »). Ou de la mise en place des « ERP » il y a 20 ans, des systèmes « magiques » d’intégration de toutes les données de l’entreprise. Une mise en place à coups de multiples itérations de développement, et des « formations » pour tenter de s’approprier l’outil…
Un effet de mode qui pousse à adopter de nouveaux outils, pour rechercher une meilleure efficacité, libérer les équipes de tâches à faible valeur ajoutée, certes. Mais aussi, trop souvent, pour donner des signes de « modernité » ou tout simplement faire « comme les autres », sans prendre nécessairement le temps de penser aux conséquences de ce « grand remplacement ».
Et là encore, les chercheurs de l’OTAN appellent notre attention.
« Les chefs militaires doivent être attentifs aux conséquences éthiques de l’utilisation extensive d’IA/ML dans les plateformes de médias sociaux, de la reconnaissance faciale par IA des systèmes de surveillance, des systèmes de SA basés sur l’IA, des systèmes d’armes autonomes, des systèmes inhabités autonomes, de la robotique basée sur l’IA, etc… qui présentent des défis significatifs pour les défenses dans la CogWar. Ces technologies impactent les civils, les militaires et la société elle-même (…). L’enseignement, l’entraînement et l’expérience seront à l’avenir des éléments clés pour l’OTAN dans sa stratégie de défense dans la CogWar »[28]
La première question est donc d’ordre éthique, philosophique. Car la mise en place de ces outils a des conséquences sur le fonctionnement des entreprises, sur la place des femmes et des hommes qui y travaillent, sur la nature des relations humaines en général.
Et la poursuite du profit à court terme, légitime pour la survie des entreprises – ou pire encore, la seule recherche d’être « dans l’air du temps » - ne doit pas faire oublier les conséquences à long terme. Pour l’entreprise elle-même, mais aussi pour la société et les éco-systèmes dans lesquels elle évolue, et dont elle se nourrit.
Une autre question est celle, inévitable, de la mise en place de ces nouveaux outils – et des pratiques qui y sont associées.
Car on peut considérer qu’il s’agit d’un « grand remplacement ». Mais aussi que ces évolutions nécessitent de se poser, avec plus d’acuité encore, la question de la collaboration entre les hommes et les « machines intelligentes ». La collaboration, un principe d’action qui repose sur la confiance.
« Des voies de progrès résident d’une part dans la capacité de ces machines à mieux expliquer, à établir une confiance étayée, à communiquer plus aisément, voire à comprendre les intentions dissimulées et les émotions des acteurs humains, et d’autre part dans une nouvelle culture d’acceptation des machines par les humains »[29].
Une question qui peut faire froid dans le dos, mais qui en tous cas doit être posée aux décideurs, qu’ils soient civils ou militaires, afin qu’ils s’en emparent vraiment, plutôt que de la laisser seulement, aux spécialistes des technologies qui ont déjà tant à faire…
Les entreprises, champ d’action et d’entraînement
La guerre se prépare. En matière de guerre cognitive comme d’autres, plus mécaniques ou charnelles, l’entraînement est nécessaire.
Encore une fois : nous passons beaucoup de temps dans nos activités professionnelles. Et c’est pourquoi nous recommandons de considérer cet espace à la fois comme un champ d’action, avec des bénéfices directement attendus pour l’activité économique, mais aussi comme un champ d’entrainement pour des citoyens confrontés à une guerre cognitive qui pourra déterminer l’avenir de nos sociétés démocratiques – et de leur efficacité professionnelle, s’il faut absolument le rappeler.
Car chacun possède une « personnalité cognitive » : « La personnalité cognitive est la façon spontanée qu’un individu à de connaître le monde »[30].
Et à l’instar de tous nos traits particuliers, celle-ci évolue. Pour le meilleur et sans doute aussi pour le pire. Un « pire » qu’on pourrait voir dans ce « monde éditorialisé » que décrit Gérald Bronner dans son excellent « Apocalypse cognitive »[31]… dont le titre est précisément un exemple (quel talent !) des caractéristiques de ce qui appelle le plus facilement notre attention : le catastrophisme, l’incomplétude cognitive, l’indignation…
Mais un « pire » qu’il est possible de réduire, et un « meilleur » que l’on peut développer – et la lecture du livre de Gérald Bronner y contribue grandement, comme d’autres de ses ouvrages.
Car doit-on attendre quelque chose des médias, ou des réseaux sociaux ?
Comme le démontre l’auteur, les fonctionnements délétères qui sont tant décrits et décriés ne sont pas dus à un complot, à une intention délibérée de « fabriquer du crétin » (un autre ouvrage de référence). Mais sont bien plutôt une réponse à nos propres appétences cognitives…
Alors, chaque entrepreneur, qu’il soit public ou privé, et dès lors que son modèle de rentabilité ne repose pas exclusivement sur une économie de l’attention (ce qui ne l’empêche pas, en théorie au moins, d’être le plus vertueux possible), peut, dans ses pratiques professionnelles et quotidiennes, contribuer à développer le meilleur et réduire le pire. Le sien et ceux sur lesquels il a une influence, une responsabilité, une fonction pédagogique.
Reprendre la main sur nos décisions, et sur l’action
La guerre cognitive nous détourne de l’essentiel : la prise de décision qui précède l’action.
Dans sa dimension guerrière, c’est un des objectifs de la force hostile, comme le décrit le schéma ci-dessous[32] :
Mais dans les entreprises, cette confusion est surtout suscitée, sauf exception, par des mécanismes autres. Il n’y a pas de « complot ». Seulement les effets induits de mécanismes de mode, d’attention, de perte de sens, de dynamiques organisationnelles…
Des effets que l’on retrouve parfaitement décrits dans le schéma ci-dessus.
- L’attention portée aux nouveaux outils, qui captent l’attention et les budgets : c’est « faire consacrer de l’énergie cognitive aux outils plutôt qu’à ce pour quoi sont faits les outils ».
- Celle que l’on a consacrée à l’intention de « tout savoir » grâce aux données (même si l’impossibilité constatée à traiter les données des « data lakes » semble désormais avoir conduit beaucoup d’entreprises à revenir à plus de bon sens) : c’est « faire consacrer de l’énergie cognitive aux formats plutôt qu’à ce que contient l’information ».
- Quant aux fonctionnements bureaucratiques qui privilégient la « connaissance » à l’action, en raison notamment d’une toujours plus grande aversion au risque, mais aussi d’une évolution naturelle de ces organisations du « savoir », on les retrouve dans « faire consacrer de l’énergie cognitive au risque de la décision plutôt qu’à la décision ».
C’est pourquoi les transformations organisationnelles ne doivent pas être guidées par des modes ou des modèles transposés sans précautions.
Et l’économie de l’attention a aussi ses transpositions dans le monde des entreprises, alors que les agendas partagés – l’outil – et le déroulement de paradigmes centralisateurs et bureaucratiques – le fond – conduisent à saturer, avec les agendas, l’attention des décideurs.
Le préalable à l’action est la décision. Une décision qui se prend avec des temps de recul, de maturation – indispensables à toute créativité, y compris stratégique.
C’est pourquoi, en la matière, nous recommandons le recours à un travail de priorisation et d’allocation de la ressource « temps ». Une ressource que des pratiques comme la « chronostructure », par exemple, permettent de mieux gérer.
Vers une intuition collective ?
Pour faire face à la surcharge cognitive redoutée tant par les décideurs militaires que civils, Karl Weick met en avant un des cinq principes des organisations hautement résilientes : le « recours à l’expertise ». Ce que les armées décrivent par « la fonction prime sur le grade », à savoir le recours à la hiérarchie des compétences plutôt qu’à celle de l’organisation… Et qui est pour Weick, rappelons-le, une expertise collective.
C’est ce qu’on appelle plus communément dans les pratiques managériales, la délégation. Mais pas une délégation « hiérarchique », qui risque de n’être que la déclinaison d’une volonté de contrôle. Une délégation aux compétences.
Ce qui veut dire, par exemple, de ne pas craindre de s’entourer d’équipiers aux compétences plus développées que les nôtres. Plus développées localement, mais souvent moins larges. En attendant qu’ils grandissent, ce qui est aussi un enjeu managérial.
Face à cette « surcharge cognitive », Weick propose aussi la « création de sens » : ce qui permet de donner du sens, ou non à un événement. Et pour lui, cette capacité à donner du sens est lié à l’expérience, à l’expertise, et à ce qu’on peut appeler « l’intuition » (dès lors que l’on considère que celle-ci repose sur les deux premiers termes)[33].
Cette « intuition » est proche de ce que Daniel Kahneman - aussi cité dans les travaux de l’OTAN - appelle le « système 1 » : « Il faut trouver des méthodes qui développent et aident les gens à apprendre à être vigilants, intuitivement. (….) Ceci les aidera à réguler leurs propres comportements, afin qu’ils deviennent des comportements intuitifs acquis, de système 1. (…) Cette façon de faire de l’intuition une ressource positive plutôt qu’un biais nécessite que les individus comprennent les mécanismes de la guerre cognitive, afin qu’ils aient une plus grande chance d’y intervenir »[34].
Faire du « système 1 » une force, alors qu’il est souvent décrit comme le « maillon faible » de notre vigilance, puisque sensible aux biais, aux préjugés, aux habitudes ?… Alors que le « système 2 » est valorisé en la matière, avec l’habituel recours à la raison, à la réflexion. Voilà qui peut donc surprendre.
Mais c’est un point de vue pragmatique – là où beaucoup s’appuient sur un monde « idéal ».
Puisque le « système 1 » est celui de l’immédiateté, dans lequel nous baignons, et aussi celui des réactions de survie, autant le « durcir » en l’entraînant plutôt que de seulement en appeler à la prévalence du « système 2 ».
Mais là encore, les recommandations de Weick permettent de s’assurer que le « système 2 » est en veille active et fonctionne à ce titre en régulation. Avec le recours à l’expertise collective et au partage de sens qui permet de s’interroger, régulièrement, sur ce que nous faisons.
Ce qui nécessite de se garder le temps nécessaire. Pour soi-même. Et avec les autres.
L’enfer, c’est les autres ? ou mieux travailler ensemble ?
On le voit, la guerre cognitive est donc l’affaire de tous. Et donc l’affaire des entreprises aussi, et pas seulement dans un rôle de supplétifs dans le cadre d’une « économie de guerre ».
La guerre cognitive nécessite des moyens techniques, certes, mais aussi des pratiques collectives qui améliorent la résilience globale – celle du réseau des citoyens que nous sommes tous, et dans le cadre de toutes nos activités.
Au cœur de cette efficacité cognitive, il y a le collectif.
Cette affirmation peut paraître surprenante car, dans le domaine de l’attention comme dans d’autres, on peut (légitimement ou non) considérer que « l’enfer c’est les autres ».
Alors bien sûr, une partie de nos activités doit légitimement faire appel à un travail individuel – et en particulier parce que, in fine, face à la décision, « le chef est seul ». C’est indispensable, et ce travail est d’ailleurs souvent fait « en tâche de fond », pendant un exercice physique qui irrigue le cerveau, ou pendant le sommeil qui traite et organise les informations disponibles.
Mais si l’aboutissement de la décision est solitaire, le processus qui y conduit doit être naturellement collectif. Et aussi parce que la mise en œuvre efficace de cette décision ne pourra être que collective.
C’est pourquoi, dans ce domaine comme dans d’autres, il est indispensable de « mieux travailler ensemble ».
Et nous pouvons vous y aider !
[1] Qui demeure, rappelons-le, l’autre langue officielle de l’Alliance Atlantique
[2] « Le cognitive warfare et l’avènement du concept de ‘guerre cognitique’. Bernard Claverie, François Du Cluzel, in « Cognitive Warfare : la guerre cognitique ». B. Claverie, B. Prébot, F ; Du Cluzel. NATO-CSO-STO, octobre 2021, disponible sur : https://innovationhub-act.org/wp-content/uploads/2023/12/NATO-CSO-CW-2021-10-26.pdf
[3] « La guerre cognitive : agir sur le cerveau de l’adversaire », David Pappalardo, Le Rubicon, 9 décembre 2021. Disponible sur : https://lerubicon.org/la-guerre-cognitive/
[4] On trouve de nombreux articles consacrés au sujet. Des podcasts aussi, comme cet épisode de « Le Collimateur » animé par Alexandre Jubelin : « Trouver une réponse face aux manipulations de l'information. Vie et destin de Viginum », du 16 avril 2024, avec Marc-Antoine Brillant, disponible sur toutes les plate-forme.
[5] « Synthèse », in Mitigating and Responding to Cognitive Warfare (Atténuer et répondre à la guerre cognitive)
[6] “Towards a framework of science and technological competencies for future NATO operations”, Janet M. Blatny, Yvonne R. Masakowski, in Mitigating and Responding to Cognitive Warfare (Atténuer et répondre à la guerre cognitive) – STO Technical Report, OTAN, Mars 2023, accessible sur : www.sto.nato.int
[7] “Towards a science and technological framework - The House Model”, Benjamin J. Knox, in Mitigating and Responding to Cognitive Warfare (Atténuer et répondre à la guerre cognitive)
[8] Ces descriptions sont issues de l’article cité précédemment.
[9] « Sensibilisation et résilience, les meilleures armes contre la guerre cognitive », John Hopkins University & Imperial College. Nato Review, 20 mai 2021. Accessible sur https://www.nato.int/docu/review/fr/articles/2021/05/20/sensibilisation-et-resilience-les-meilleures-armes-contre-la-guerre-cognitive/index.html
[10] “La guerre cognitive : pourquoi l’Occident pourrait perdre face à la Chine », Kimberly Orinx, Tanguy Struye de Swielande, in « Cognitive Warfare : la guerre cognitique ». B. Claverie, B. Prébot, F ; Du Cluzel. NATO-CSO-STO, octobre 2021
[11] Pour en savoir plus sur la « sociodynamique », on pourra se référer utilement aux travaux et activités de l’Institut de la Sociodynamique (https://www.institutdelasociodynamique.com). Et/ou me contacter pour des sessions de formation managériale ou l’accompagnement de vos projets humainement sensibles.
[12] « Team of teams. New rules of engagement for a complex world”, General Stanley Mc Chrystal, Portfolio Penguin, 2015
[13] Traduction par nos soins, in “Developing cognitive neuroscience technologies for defence against cognitive warfare”, Claude C. Grigsby, Richard A. McKinley, Nathaniel R. Bridges, Jennifer Carpena-Nunez, in “Mitigating and Responding to Cognitive Warfare(Atténuer et répondre à la guerre cognitive)”
[14] On pourra notamment se référer à : « The ‘new view’ of human error. Origins, ambiguities, successes and critiques », Jean-Christophe Le Coze, 2022, in Safety Science, 54. 105853.
[15] « Le partage de conscience de situation est un lien de fragilité cognitive », Baptiste Prébot, in « Cognitive Warfare : la guerre cognitique », op.cit.
[16] « Managing the unexpected. Resilient performance in an age of uncertainty” – 2nd Edition. Karl E. Weick, Kathleen M. Sutcliffe, Josey-Bass, 2007
[17] Baptiste Prébot, op. cit.
[18] Traduction par nos soins in « Managing the unexpected. Resilient performance in an age of uncertainty” – 2nd Edition. Karl E. Weick, Kathleen M. Sutcliffe, Josey-Bass, 2007
[19] idem
[20] On pourra par exemple écouter le nouveau podcast « Optimizing Human Performance”, coproduit par « The Wavell Room » - un site britannique de référence en matière d’affaires militaires, qui fait explicitement référence à ces concepts.
[21] Traduction par nos soins, in “Situational awareness, sensemaking and future NATO multinational operations”, Benjamin J. Knox, Yvonne R. Masakowski, in Mitigating and Responding to Cognitive Warfare (Atténuer et répondre à la guerre cognitive), 2023, op.cit.
[22] Traduit par nos soins in « Managing the unexpected : complexity as distributed sensemaking”, Karl E. Weick, in “Making sense of the organization. The impermanent organization. Volume 2.” John Wiley, 2009. Weick y parle de “networks” - réseaux – mais nous l’avons traduit par « organisations » par raccourci d’une démonstration précédente dans l’ouvrage.
[23] “Qu’est-ce que la cognition et comment en faire l’un des moyens de la guerre », Bernard Claverie, in « Cognitive Warfare : la guerre cognitique », op.cit.
[24] Voir par exemple « Vive la diversité! High Reliability Organisation (HRO) AND Resilience Engineering (RE)”, Jean-Christophe Le Coze, in Safety Science, Volume 117, August 2019 – Accessible par doi:10.1016/j.ssci.2016.04.006
[25] Et notamment dans “Human-Machine teaming towards a holistic understanding of cognitive warfare”, Franck Flemisch, in Mitigating and Responding to Cognitive Warfare (Atténuer et répondre à la guerre cognitive), 2023, op.cit.
[26] “Human detection and diagnostic of system failures”, edited by Jens Rasmussen and William B. Rouse, Nato Conference Series – Human Factors, Plenum Press 1981
[27] Par exemple, l’article « Aux Philippines, avec les petites mains de l’IA », Les Echos Week-End, 24 mai 2024
[28] Traduit par nos soins dans “Defense against 21st century cognitive warfare : considerations and implications of emerging advanced technologies”, Yvonne R. Masakowski, Eskil Grendahl Sivertsen, in Mitigating and Responding to Cognitive Warfare(Atténuer et répondre à la guerre cognitive), 2023, op.cit.
[29] « Confiance entre les humains et les machines intelligentes, et biais cognitifs induits », Général Gilles Desclaux, in « Cognitive warfare – la guerre cognitique », op.cit.
[30] “Defense against 21st century cognitive warfare : considerations and implications of emerging advanced technologies”, op.cit.
[31] « Apocalypse cognitive », Gérald Bronner. PUF, 2021
[32] Bernard Claverie, op cit.
[33] « Information overload revisited », Kathleen M. Sutcliffe, Karl E. Weick, et “Organizing and the process of sensemaking”, Karl E. Weick, Kathleen M. Sutcliffe, David Obstfeld, in “Making sense of the organization. The impermanent organization”, op.cit.
[34] « Cognitive and behavioral science (psychological interventions)”, Benjamin J. Knox, in “Mitigating and Responding to Cognitive Warfare (Atténuer et répondre à la guerre cognitive)”, op.cit.