Après Samsung : êtes-vous "connectés" à vos clients ?

Publié le 13 Octobre 2016

Après Samsung : êtes-vous "connectés" à vos clients ?

L’accident industriel et financier que connaît Samsung avec son Galaxy Note 7 est une crise telle qu’en rencontrent beaucoup d’entreprises. Au-delà des impacts immédiats sur le cours de bourse et, demain, sur la « réputation » de la marque, cet événement peut aussi permettre d’évaluer la qualité de la relation d’une entreprise avec ses « territoires ».

 

Les entreprises négligent trop souvent, en matière de relation client, l’affectif. Ou bien plutôt, elles réduisent cette relation au volet affectif de l’acte de consommation. Elles convoquent les études sociologiques, et maintenant le neuromarketing, elles élaborent des packagings, des campagnes de communication, pour stimuler les perceptions, les sens, voire les « émotions » afin de susciter, in fine, un acte d’achat.

Avec les technologies numériques, cette « relation » est projetée dans le monde virtuel : on anime des « communautés », on entretient l’apparence d’une interaction, que l’on confie déjà à des programmes d’intelligence artificielle, qui imitent – et tentent d’influencer - les comportements en ligne.

Mais le consommateur est, par nature, volage et infidèle. Car aucun marché n’est vraiment monopolistique, et la concurrence – et en particulier celle qui n’existe pas encore -  saura toujours trouver le moyen de gagner des parts de marché. Quant aux « communautés » virtuelles, elles n’ont de qualité que celle que l’on veut bien leur imaginer… jusqu’à une stimulation concurrente en fait. Car, en dépit des fantasmes projetés sur le big data et d’une hypothétique relation permanente, grâce aux objets connectés, aucune marque n’est propriétaire de ses clients.

Et puis surtout, lorsque survient une crise due, selon le style et les tropismes de chacun, au « destin », au « manque de bol », ou tout simplement, à l’accident ou l’imprévu, cette relation est mise à l’épreuve des émotions, les vraies. Celles qui provoquent des ruptures.

Aujourd’hui, avec Samsung, il n’y a pas de morts. Pas plus qu’il n’y en a eu avec les crises rencontrées par Deutsche Bank ou Volkswagen (en tous cas, pas directement). Ce n’est malheureusement pas le cas avec des accidents de transports aériens ou terrestres. Et les conséquences sont moins visibles que celles des événements catastrophiques de l’industrie pétrolière (Total, BP…).

 

Les accidents révèlent la qualité d’une relation

Pourtant, au-delà des victimes des accidents dont le traitement relève souvent seulement de la compensation financière, et trop rarement de la vraie compassion, tous ces événements révèlent la qualité de la relation d’une entreprise avec ses « territoires » : tant physiques que numériques.

Tout événement grave, et donc générateur d’émotions vraies, sera en effet perçu au regard d’une relation existante. La première réaction du spectateur – et encore moins de la « partie prenante » est rarement objective : elle se construit sur un crédit ou un procès d’intention. On « comprend », on peut même « excuser » l’événement tragique subi par une entreprise que l’on apprécie, peut-être même y compatir - personne ne peut prévoir l’imprévisible. Mais, en raison du « biais de confirmation », on est impitoyable avec une entreprise à laquelle on prête des intentions ou des pratiques « coupables » (chacun pouvant y mettre le sens qu’il souhaite).

 

Beaucoup d’entreprises, dans leur anticipation des crises, prennent donc en compte leur « réputation ». Et elles flattent, souvent, des « relais d’opinion » afin que, le moment venu, elles puissent compter sur eux. Mais soutiendrez-vous une entreprise en difficulté parce qu’elle vous a offert un cocktail, ou même des échantillons de ses produits ? En matière de relation, il n’y a aucune de « reconnaissance du ventre ».

Une deuxième étape, dans la construction d’une relation, consiste à mieux se connaître. A l’heure numérique, les entreprises se flattent de mieux connaître leurs clients et, avec les algorithmes du big data, affirment pouvoir, demain, mieux les connaître qu’eux-mêmes… Mais pour se faire connaître, c’est l’affaire de la « communication ».

Pourtant lors de l’accident, par nature imprévu, les perceptions se réalignent avec les réalités. Et tout décalage se traduit en déception et en défiance. Car le client ne se blâme jamais lui-même d’une confiance mal investie, il en fait porter la faute à l’autre.

Une relation ne se construit pas seulement de l’information que chacun fournit à l’autre, volontairement ou non. Elle se nourrit de ce que chacun y apporte, et de ce que les deux parties prenantes partagent, au-delà de la relation commerciale et contractuelle de client-fournisseur.

 

Construire mieux qu’une relation : une connexion

Une relation peut être à sens unique. Une connexion relie les deux parties.

Toute entreprise a ses territoires, même pour les acteurs du numérique : un lieu où se noue le contact. Et ces territoires sont, potentiellement, des lieux où une action commune peut prendre forme, pour construire un présent et un futur communs. Car la plus solide des connexions est celle de la construction partagée : la co-construction, pour reprendre le terme en vogue.

Lors d’une crise, ces acteurs ne sont alors pas seulement des spectateurs, ils sont des parties prenantes, et s’engagent comme telles. Relais d’information, pédagogues, défenseurs et promoteurs.

Mais la construction de cette connexion nécessite de vrais choix stratégiques et opérationnels. Car construire avec, c’est ouvrir ses portes avec sincérité, et inclure l’autre. Ne pas le considérer seulement comme consommateur. Ni même comme « consomm-acteur », où le client génère lui-même une partie du service qu’il paie. C’est le considérer comme un partenaire.

A l’heure du numérique, alors que la proximité peut s’affranchir des contraintes physiques, les entreprises connectées à leurs « territoires » ont la chance de pouvoir renouveler les dynamiques des « entreprises élargies » : des réseaux de partenaires fiables et fidèles, avec leurs compétences et leurs capacités de démultiplication, mobilisables en fonction des besoins, des projets.

Et au premier rang de ces partenaires se trouvent les clients. Ces partenaires-clients-fournisseurs constituent le plus proche écosystème de l’entreprise. Sa première ligne d’action et, le cas échéant, de défense. Et son premier vivier de recrutement, à l’heure de la « guerre des talents ».

Alors cela nécessite bien sûr de l’agilité – pas la « méthode », mais bien la qualité -, pour s’adapter à des acteurs d’autres cultures organisationnelles et les intégrer pleinement, et de l’humilité – pour reconnaître et bénéficier de leurs compétences -. Ce sont peut-être là les vrais changements stratégiques que l’entreprise connectée doit opérer.

Rédigé par Kaqi

Publié dans #Management, #Territoires

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article