Ressources stratégiques : nombrilisme ou anticipation ?
Publié le 1 Février 2012
Avec la campagne électorale en cours en France, les discours des dirigeants politiques et les prises de parole des représentants du monde économique soulignent le prisme mental dominant, soit par habitude, soit par nécessité : comment organiser la fiscalité - c'est à dire la contribution aux dépenses publiques - des producteurs de richesse. Ponctionner les entreprises, ou les préserver de l'aspirateur à phynances, l'approche politique l'emporte, avec ses clivages et ses anathèmes.
L'indispensable maîtrise des approvisionnements miniers
Les Échos de mardi 31 janvier ont relaté la création, par les industriels allemands et avec le soutien du gouvernement, d'une initiative commune visant à sécuriser leurs approvisionnements en terres rares : des éléments indispensables à l'industrie hi-tech (cf nos articles précédents). En France, le BRGM, une structure publique, est chargé de cette mission stratégique... Structure publique vs mobilisation partagée; quelques experts d'un côté, l'alliance entre grandes entreprises, avec leurs moyens dédiés de l'autre.
Mais, en France, certains pourraient penser, haineux de l'initiative privée, souci de l'intérêt général contre soif du capital... Le match du "Géoportail" national, lancé avec publicité, retards et fonds publics, pour "concurrencer" Google Earth, pourrait bien malheureusement illustrer les faiblesses de l'approche idéologique, "à l'albanaise version Enver Hodja" (nous sommes des victimes et nous avons raison contre le reste du monde), face au pragmatisme partagé qui pousse à l'action.
Lorsque les dernières chaînes de production s'arrêteront faute d'avoir garanti l'approvisionnement en matières premières, il sera sans doute toujours question de se révolter contre la cruauté des marchés, l'iniquité des chinois ou des russes qui gardent leurs ressources pour leur industrie, l'arrogance des allemands qui continuent à produire, à nos frontières... Et de pleurer.
Et aussi, la fin de la suffisance alimentaire ?
Espérons que la prochaine étape ne sera pas, après la fin de l'indépendance stratégique minière, celle de la suffisance alimentaire. Car si la France fut un pays agricole, l'expansion galopante des "maisons de maçon" autour des centres urbains provoque la disparition des meilleures terres agricoles. Il peut être en effet fécond de considérer que les centres de vie, historiquement, se sont créés là où la terre était la plus fertile - puisqu'on cultivait son champ à deux pas de chez soi. Et qu'il ne s'agit pas seulement, pour produire des ressources alimentaires, de planter un champ, là où on n'a pas envie de construire...
Pavillon contre nourriture, tel sera peut-être le débat de demain, étape suivante de nos constats d'impuissance... En la matière, l'annonce de l'assouplissement des contraintes publiques à la construction de logements aurait pu s'inscrire dans la prise en compte de cet enjeu là... Peut-être pourra-t-il s'agir, au mieux, d'un bénéfice collatéral.